Camus: « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » [Essais]

Voilà un temps certain que je n’ai rien écrit et ce n’est pas encore cette fois-ci que je vais le faire. Pris par d’autres tâches j’ai quelque peu laissé le clavier au repos.

Cependant, je n’ai durant cette période nullement abdiqué toute forme de lectures. Elles sont plus enrichissantes que l’info télévisée et surtout que l’info sur la toile qui se résument à des bribes d’infos, semi-véridiques, parfois authentiques aussi, mais laissant planer le doute sur qui me parle, sur les sources elles-mêmes, sur information / désinformation / manipulation.

J’ai lu avec intérêt « Paysans » de René Bécouze, Bérangère Carel et Eva DZ qui m’a remis en mémoire une démarche aveyronnaise spécifique issue de la J.A.C., démarche d’ampleur nationale dans le monde agricole de la deuxième partie du XX° siècle, et fait revivre l’action de nombre de personnalités que j’ai parfois rencontrées au cours de ces années de militantisme.

Mais surtout je n’ai pas négligé la presse et dans celle-ci les articles qui, au-delà de l’immédiateté des événements, portent l’éclairage de gens compétents, ayant le recul et la réflexion nécessaires, sur l’état de la société et des remous qui l’agitent à la veille d’élections importantes.

Ainsi en est-il de l’entretien exclusif dans l’Huma du 24 mars de Jérôme Ferrari, professeur de philo en Corse, prix Goncourt 2012 pour « Sermon sur la chute de Rome », entretien intitulé « Si le lien des mots à leur référence est coupé, toutes les manipulations sont possibles ».

Pourquoi tenter de dire soi-même ce que d’autres disent mieux que vous? Laissons lui la parole  dans ces quelques extraits:

  • sur l’enseignement:  » aujourd’hui, on conçoit uniquement l’enseignement comme une préparation au monde du travail or la philosophie est enseignée pour que les élèves acquièrent une autonomie de la pensée. Je ne suis pas là pour leur donner des compétences mais des apprentissages. Le tout est politique au sens noble du terme et n’a pas à voir avec le monde de l’entreprise. L’entreprise n’a rien à faire dans les murs d’une école ».
  • sur Hannah Arendt qui écrivait en 1951: « Le citoyen idéal d’un régime totalitaire n’est pas un militant convaincu, c’est quelqu’un pour qui la distinction entre vérité et mensonge n’a plus aucun sens ».
  • Sur le contenu du débat politique: « être un homme (une femme) politique, voir les tentations identitaires, le gros danger qui guette, et trouver que c’est une bonne idée d’en jouer, c’est criminel, indigne. Peut-être qu’en France l’explosion de la droite et de la gauche, pour des raisons assez symétriques, est le signe d’une crise où les superstructures ne correspondent plus à la réalité sociale ».
  • Sur Schopenhauer et l’art de manipuler le débat pour avoir toujours raison: Je défends A et je fais en sorte que B soit inacceptable pour tout le monde. Donc si ce n’est pas B, ce sera forcément A. Je cite deux exemples surutilisés par Manuel Valls d’une manière que je juge indigne. Vous êtes contre la déchéance de nationalité donc vous ne voulez pas lutter contre le terrorisme. Vous ne soutenez pas la politique d’Israël donc vous êtes antisémite. C’est dangereux et contre productif ».

A méditer à l’heure où la noria incessante, méthode Coué oblige, de certain-e-s candidat-e-s peuple les émissions du petit écran. Un téléspectateur averti, n’est-ce pas…….! Vous connaissez le dicton.