Le mois Artaud victime du covid

 Aujourd’hui devait avoir lieu le décrochage des deux expositions  de peintres  au talent bien connu organisées par l’Association Antonin Artaud dans le cadre du mois de commémoration annuelle de la disparition du poète le 4 mars 1948.

Deux excellentes expositions largement contrariées par le confinement interdisant de se rendre au premier étage de la mairie de Rodez pour celle consacrée à René GABEN  ainsi qu’à l’Espace Antonin Artaud (ex chapelle Paraire de l’asile où vécut trois ans Antonin) pour les œuvres de Michel JULLIARD, de Jean-Luc FAU, de Cyril HATT et de Didier ESTIVAL.

Elles n’ont hélas pas connu le succès qu’elles méritaient.   M’y étant pris trop tard, il m’a même été impossible de faire quelques photos pour vous faire regretter les effets du corona virus qui vous a privé de ces deux visites exceptionnelles. De même ont été annulées le samedi 21 mars la conférence de Patrice TRIGANO « Artaud Passion -La canne de St Patrick » et la pièce de théâtre du même auteur le 22 mars à Rieupeyroux avec William Mesguich et Nathalie Lucas. Nous espérons que ce n’est que partie remise, peut-être l’an prochain.

J’ai donc dû « emprunter » au « Petit Journal » (qui j’espère me le pardonnera) cette page pour vous donner une idée de la première expo citée: « Une peinture en temps de détresse ».

 J’aime particulièrement les deux tableaux du bas (non pour les portraits de vos deux serviteurs Mireille et moi-même…je vous entends déjà!….), mais pour les reprises, sur fond de calculs scientifiques, de lignes géométriques  et d’organisation de couleurs qui ne vont pas sans rappeler Mondrian, d’une part une référence au GRECO (Cardinal Fernando Nino de Guevara -1598 – cathédrale deTolède) d’une ironie féroce (portrait du bas à gauche) et d’autre part à la Dame de St Cernin (portrait du bas à droite) des ponts entre le néolithique, la Renaissance  -début de l’âge d’Or espagnol- et l’informatique , le monde actuel.

Pas de clichés, hélas, de la seconde expo « Folies d’Artistes », mais des œuvres géantes que le lieu permettait et qu’il eût été bien difficile de photographier.

10m X 1,50 m telle était la bande dessinée  de Michel JUILLARD que chacun connaît bien, art brut, sans contraintes sauf celles qu’il se fixe lui-même et qui demande des longs moments d’attention et de plaisir à la parcourir.

La rivière de Jean Luc FAU qui ruisselle de l’oculus jusqu’au sol et tente d’y remonter sous forme de bulles comme l’expliquait Mireille lors du vernissage.

Au centre de la chapelle , les Mariés de Cyril HATT dont « la première expo a eu lieu il y a une dizaine d’années à la maison de couture Lanvin: un couple tout cabossé tentant  de se tenir debout dans une auto tout aussi cabossée » (Mireille) marque de fabrique de Cyril, artiste lui aussi reconnu.

Enfin Didier ESTIVAL occupant tout un mur de la chapelle dans une fresque aux réminiscences, dans la forme et la composition, de « L’Enfer » du « Jardin des Délices » de Jérôme BOSCH(peintre flamand vers 1 500 – Le Prado)

Des artistes aux inspirations multiples, au talent reconnu et aux affinités aveyronnaises, que nous espérons revoir très bientôt dès que les conditions le permettront. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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La Peste, le Choléra et le Corona

Non,ce n’est pas une réminiscence du 2°tour des présidentielles de 1969 entre Pompidou et Poher mais, pour les plus de cinquante ans qui s’en souviennent encore, du slogan quant au non-choix possible entre la peste et le choléra rendu célèbre par Jacques Duclos. Il s’agit bien de littérature permettant d’éclairer l’actualité. 

« Le docteur regardait toujours par la fenêtre. D’un côté de la vitre la douceur du printemps, et de l’autre côté le mot qui résonnait encore dans la pièce: la peste….Le docteur s’impatientait. Il se laissait aller et il ne le fallait pas. Quelques cas ne font pas une épidémie et il suffit de prendre des précautions. Il fallait s’en tenir à ce qu’on savait, la stupeur et la prostration, les yeux rouges la bouche sale, les maux de tête, les bubons, la soif terrible, le délire…et au bout de tout cela….oui au bout de tout cela, on était pendu à un fil…Le mot ne contenait pas seulement ce que la science voulait bien y mettre…mais une longue suite d’images extraordinaires…Non, tout cela n’était pas encore assez fort pour tuer la paix de cette journée. » Albert CAMUS – La Peste- (1947)

Le roman de Camus décrit de la ville d’Oran totalement isolée par  la peste  et se penche sur les attitudes diverses de sa population face à  cette situation de détresse: une allégorie renvoyant aux divers comportements lors de l’Occupation.

 

 

« Angelo pressa son cheval dans l’idée qu’il trouverait peut-être là un pays moins dévasté…. Il s’approchait de la grande vallée quand il vit devant lui la route barrée par des tonneaux avec lesquels on avait fait une sorte de  barricade. On lui cria de s’arrêter. « Halte je te dis lui cria une sentinelle et ne bouge plus sinon je t’envoie du plomb dans les côtes. As-tu une billette? ». Comme Angelo ne comprenait pas, l’homme lui expliqua que c’était une sorte de passeport  que le maire du village devait lui donner et sans lequel on ne le laisserait pas passer. « Et pourquoi? lui dit Angelo -C’est pour certifier que tu n’es pas malade et que tu n’apportes pas le choléra dans tes poches ». Bougre, se dit Angelo, ce n’est pas le moment de dire la vérité: « Je l’apporte si peu…que j’étais dans la montagne et que je ne suis pas retourné au village, c’est pourquoi je n’ai pas de billette ». Jean Giono – Le Hussard sur le Toit – (1953)

Jean GIONO-Le Hussard sur le Toit- 1953

Peu d’années après Camus, Giono, sur le même thème, narre une épidémie de choléra touchant la Provence sous le règne de Louis Philippe. Sous forme d’aventure captivante l’auteur relate une catastrophe qui s’abat sur les gens et les réactions humaines qu’elle déchaîne.

Deux grands romans  à relire avec plaisir et surtout à méditer.